Comme on s’amuse depuis deux ans à me donner des promis que je ne connais pas le plus souvent, la chronique matrimoniale de Moscou me fait comtesse B[ésouhoff]. Mais vous sentez bien que je ne me soucie nullement de le devenir.

Vous plaisantez sur mes relations avec le petit comte Nicolas Rostoff. Eh bien je vous avouerai que malgré l’extrême jeunesse de ce prétendant, c’est celui que j’aurais choisi le plus volontiers. (Je n’ai pas besoin de vous recommender la discrétion.)[1157]

[Далее со слов: Il a tant de noblesse… кончая словами: mais j’ai cru de mon devoir de vous en avertir. – близко к печатному тексту. T. I, ч. I, гл. XXII.]

Le jeune homme a soupé chez nous avant hier. II vient d’arriver de Pétersbourg et compte accompagner son père dans sa tournée et pousser jusqu’à chez vous comme si c’était en passant. Il est très beau, c’est tout ce que je puis dire, car j’ai été si occupée ce soir que je n’ai pas eu le temps de lui adresser la parole après sa présentation.

Karamsine a soupé chez nous le même soir. Quel homme! Chère amie, je n’ai jamais cru pouvoir rencontrer tant de perfection dans un être masculin. Maman me fait chercher pour aller dîner chez les Apraksines, je vous quitte. N’oubliez pas de lire le livre de… que je vous ai envoyé. Voilà la religion que je comprends.

La mort de votre bonne, comme je m’en aperçois d’après votre dernière [lettre], a dû vous donner des idées bien noires. Lisez ce livre et vous sentirez que la mort n’est que le passage au bonheur de l’éternité.[1158]

Княжна отвечала:

1805 год 12 Août. Lissi Gori.

Nous voilà parvenus à la fète de mon père, jour de réjouissance chez nous, comme vous le savez, chère bonne amie. Nous l’avons passé assez tristement, car la veille même du 11, une heure après la messe, j’ai vu finir ma pauvre bonne. Elle a terminé sa longue et pénible agonie d’une manière digne d’envie pour tout bon chrétien, pas moins; comme je lui ai été fort attachée, sa mort quelque préparée que j’y aie été, n’a pas laissé que de me déranger sensiblement. Accoutumé à elle depuis ma naissance je la pleure amèrement. Vous avez tort, chère amie, d’attribuer à des idées noires produites par la maladie le sens où j’avais conçu la lettre qui vous l’avait apprise. Je vous assure qu’elle n’y était pour rien; mais depuis que je suis à la campagne, une réunion de plusieurs circonstances, telle, par exemple, que le spectacle continuel d’une femme mourante. (Quoique logée dans l’aile pendant sa maladie et malgré la défense de mon père, je ne pouvais m’abstenir de ne pas aller la voir deux fois par jour et elle [est] morte sur mes bras.) Ce spectacle, dis-je, a dû donner à mon esprit une teinte moins frivole, moins éloignée de ce que l’on regarde communément dans le monde comme un sujet effrayant dont il faut détourner sans cesse sa pensée, tandis que c’est le seul peut être qui mériterait toute notre attention. Je desirerais conserver cette disposition autant que je viverai et dans quelque position que je me trouve. Malheureusement je ne puis pas répondre de moi mème. Un genre de vie plus dissipée, des distractions souvent répétées, que sais-je moi, mille choses différentes pourront m’enlever à moi même et me rendre à cet étourdissement dans lequel nous vivons tous du plus au moins.[1159]

Mille grâces, chère amie, pour la proposition de me procurer l’ouvrage qui fait si grande fureur chez vous.[1160]

[Далее со слов: Cependant puisque vous me dites… кончая словами:…et plutôt il nous en accordera la découverte parson divin esprit. –